«DEUX VICTIMES DES SEPTEMBRISEURS [LES BIENHEUREUX FRÈRES LA ROCHEFOUCAULD]» DE
LOUIS AUDIAT ; CHAPITRE 1


CHAPITRE 1. — Les La Rochefoucauld. — Origine. — Généalogie. — Famille. — Frères et sœurs. — Le Vivier et Saint-Cybard-le-Peyrat. — Naissance de Pierre-Louis de La Rochefoucauld, le 12 octobre 1744. — Notes de bas de page.


Il n'est guère de maison plus célèbre, plus ancienne et plus étendue que celle de La Rochefoucauld. On la trouve dans toutes les provinces de France, où elle avait, par ses charges importantes, par sa fortune considérable, par ses alliances puissantes, non moins que par ses services continuels, son illustration à la guerre, parfois dans les lettres, conquis une influence légitime et respectée. Les La Rochefoucauld sont en Touraine et en Berry, en Auvergne et en Poitou. Mais les deux contrées qui gardent d'eux la trace la plus profonde, c'est l'Angoumois, qui conserve encore leur berceau ; c'est la Saintonge et l'Aunis, dont ils ont possédé les principaux fiefs. Ils y ont eu Fontpatour, paroisse de Vérines, et La Jarrie ; Le Parc d'Archiac et La Bergerie, près de Tonnay-Charente ; L'Houmée et La Vallée, près de Taillebourg ; Montandre et Moutguyon, Surgères et Barbezieux, pour ne citer que les principales terres. Il y a même une branche des seigneurs de Barbezieux, une branche des marquis de Montandre, une branche des marquis de Surgères, qui existent encore.

La famille de La Rochefoucauld porte l'écu, apposé sur un manteau d'hermine, de Burelé d'argent et d'azur à trois chevrons de gueules brochant sur le tout, le premier écimé (comme les Parthenay-l'Archevêque et les Lusignan), la couronne ducale, la Mélusine pour cimier, deux sauvages pour tenants, et cette fière devise : C'est mon plaisir.

C'est Foucauld, né vers 980, qui donna, dit-on, son nom au fief de La Roche en Angoumois qu'il possédait, et qui de lui s'appela La Roche de Foucauld, Rupes Fucaldi, La Rochefoucauld. Autour du donjon primitif du XIè siècle encore debout, se sont accolées bien des constructions. Le XIVè y a posé ses deux tours jumelles protégeant la porte d'entrée. La renaissance y a ciselé ces splendides galeries, et dressé cet escalier monumental, aux marches gigantesques d'une seule pièce, que Chambord envierait. Aujourd'hui, l'édifice le plus beau de l'Angoumois n'est plus habité. Campé fièrement sur son roc, il est là défiant le temps, muet témoin du passé, et regrettant ses splendeurs évanouies. Que de longues heures j'ai passées dans ces immenses salles, admirant chaque détail de sculpture et redemandant aux murs construits par Anne de Polignac et François II de La Rochefoucauld, quelques mots d'histoire et de souvenirs !

Ce Foucauld de La Rochefoucauld est l'auteur de la famille, dont devait sortir le dernier évêque de Saintes. Et, par une coïncidence remarquable, il signa, en 1047, l'acte de fondation de la célèbre abbaye de Notre-Dame de Saintes, qui devait tomber sous les mêmes coups et en même temps que l'évêché de son arrière-neveu (1).

Du tronc primitif sort la branche de Verteuil et de Barbezieux, qui donne elle-même naissance à celles de Nouans et de Meilleran. Des La Rochefoucauld-Nouans sont issus les Rochefoucauld-Bayers. Un rameau de la branche de Bayers porta les La Rochefoucauld-Maumont, dont était Pierre-Louis de La Rochefoucauld, évêque de Saintes et martyr.

L'arrière-petit-fils de Guillaume, seigneur de La Bergerie, de l'Arthusière, du Parc d'Archiac et de Bayers, fut Louis de La Rochefoucauld, seigneur de Bayers en Angoumois, et de La Bergerie, de La Vallée et de L'Houmée en la province de Saintonge, chevalier de l'ordre du roi et guidon de la compagnie du seigneur de Pons en 1569 ; il mourut le 24 décembre 1608. Il avait épousé, en novembre 1572, Angélique Gillier, fille de Bonaventure Gillier, seigneur de Puygarreau, baron de Marmande, et de Marie Babou de La Bourdaisière. Il en eut : Louis de La Rochefoucauld, dont une petite-fille épousa (1640) Gabriel Gombaud de Champfleury (2), et le petit-fils, Pierre de La Rochefoucauld, chevalier de l'ordre du roi, seigneur de Maumont, Magnac et Barros eut de Catherine de Chaumont, François, époux (1660) de Marie-Eléonore Chesnel (3). De cette union vint François-Joseph de La Rochefoucauld, seigneur de Maumont et Magnac, capitaine au régiment de Navarre, qui épousa, en 1685, Anne Thomas, fille de Jean Thomas, écuyer, sieur des Bretonnières, conseiller du roi et garde des sceaux au présidial d'Angoulême, et de Marie Greslon (4). Il en eut :

1°, Jean, qui suit ; 2°, François-Victorin, seigneur des Bretonnières, connu sous le nom de Magnac, qui épousa Françoise Virolleau de Marillac (5) ; 3°, Marie-Anne, mariée à Jean Ravard, chevalier, seigneur de Saint-Amand, capitaine dans le régiment de Béarn ; 4°, François-Joseph, né dans l'île de Ré en 1692.

Cette filiation nous conduit ainsi jusqu'à Jean de La Rochefoucauld. Ce Jean de La Rochefoucauld est précisément le père de celui dont nous entreprenons la biographie. On vient de voir qu'il avait pour père François-Joseph de La Rochefoucauld et pour mère Anne Thomas. Les Thomas sont très connus en Angoumois, et plusieurs ont une certaine célébrité (6).

La famille Thomas eut deux branches, celle des Montgoumard, «qui va tomber en quenouille», dit Vigier de La Pile, et celle de Bardines, «qui a eu plusieurs conseillers au présidial, gens de lettres et fort considérés. Le sieur de Bardines d'à présent a épousé N. Préveraud des Deffends (7).»

Jean de La Rochefoucauld doit être né en 1686, c'est-à-dire un an après le mariage de son père. Le 6 février 1705, à 19 ou 20 ans, il fut reçu chevalier de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem. En 1722, il épousa Marie-Marguerite des Escaud ; c'était la fille de Gabriel-François des Escaud, chevalier, seigneur du Vivier, et de Charlotte de La Place (8). Elle apportait en dot à son époux Le Vivier et Chaumont. Sa sœur, probablement Hippolyte des Escaud, signa comme marraine à Saint-Cybard-le-Peyrat en 1722 et en 1732.

Les La Place sont une des plus anciennes familles de l'Angoumois. Des titres prouvent leur noblesse dès 1404. Ils étaient originaires de Saint-Jean de Ligoure, en Limousin, dans la mouvance de Pierre-Buffière (9).

Ces détails sont arides ; ils étaient nécessaires. N'a-t-on pas cherché, dans je ne sais quel intérêt, à jeter quelque doute sur la noble origine de Pierre-Louis de La Rochefoucauld et de son frère, l'évêque de Beauvais ? Il fallait montrer qu'ils étaient bien tous les deux les fils de leurs père et mère, les frères de leurs frères, et les descendants de leurs aïeux.

Pierre-Louis de La Rochefoucauld était le dixième enfant de Jean de La Rochefoucauld. 1°, L'aînée de cette nombreuse famille était l'abbesse de Notre-Dame de Soissons, Marie-Rose-Charlotte, née le 10 mai 1723, morte à Soissons, le 27 mai 1808. Abbesse en 1768 du Paraclet ou Sainte-Trinité au diocèse de Troyes, monastère bénédictin fondé par Abeilard, elle succéda en 1778 à Mme de La Rochefoucauld-Roucy sur le siège abbatial de Soissons.

2°, Le second enfant est François-Jean-Charles de La Rochefoucauld, dit le marquis de Bayers, né le 20 mai 1724. Capitaine dans le régiment des grenadiers de France, il fut blessé et fait prisonnier à l'affaire de Cassel, le 22 juin 1762. Le roi le nomma colonel des grenadiers royaux du Poitou, le 25 décembre de la même année, puis successivement brigadier d'infanterie le 22 janvier 1769 et maréchal de camp, le 1er mars 1780. Le 23 avril 1753, il épousa Marie-Hélène de Fougeu (10).

3°, Louise, née le 14 mai 1725, marraine à Saint-Cybard-le-Peyrat, en 1739, avec Pierre de Galard de Béarn, seigneur de Blanzaguet ; religieuse bénédictine.

4°, Catherine-Hippolyte, née le 22 mai 1726, morte le 20 mars 1790. Elle épousa, le 19 mars 1768 (11), Antoine de Corlieu, écuyer, chevalier de Saint-Louis, capitaine d'infanterie au régiment Dauphin, né à Labaudie le 9 septembre 1714, mort au Vivier le 20 septembre 1792 (12).

5°, Louise-Marguerite, née le 6 octobre 1728.

6°, Annet-François, né au château de Maumont le 8 août 1730, paroisse de Magnac-sur-Touvre, diocèse d'Angoulême, baptisé le 22 août suivant (13).

7°, Alexandre-François, comte de La Rochefoucauld, connu d'abord sous le nom de chevalier de Maumont, lieutenant de vaisseau, chevalier de Saint-Louis. Il épousa Marie-Élizabeth-Madeleine-Catherine de Frémont, née en 1740, veuve en premières noces de Louis-Marie-Nicolas Guillaume, seigneur de Chavaudon et de Montmagny, conseiller au parlement de Paris, et fille de Pierre de Frémont, seigneur du Mazy, président au parlement. Il reçut le baptême le 8 janvier 1734 en l'église de Magnac-sur-Touvre (14).

8°, François-Joseph, appelé d'abord l'abbé de Maumont, né le 28 février 1736 — non suivant l'Almanach royal, en 1735, ni en 1727 selon l'inscription des Carmes — à Angoulême, paroisse de Saint-Jean, nommé évêque de Beauvais, le 22 mars 1772, sacré le 12 juillet — non le 22 juin comme l'ont écrit l'Almanach royal et la France ecclésiastique — par le cardinal de Gesvres, son prédécesseur, pair de France, député aux États généraux, massacré aux Carmes le 2 septembre 1792 (15).

9°, Marie-Julie, tenue sur les fonts de Notre-Dame de Beaulieu, à Angoulême, le 20 février 1741, par Joseph et Marie, ses frère et sœur.

Reste l'évêque de Saintes. Où est-il né ? On se l'est demandé bien des fois. Ce n'est pas à La Rochefoucauld ni à Bayers, dont son frère prit le nom (16).

Comme l'évêque de Beauvais et l'évêque de Saintes ne furent, avant leur élévation à l'épiscopat, connus que sous les noms d'abbé de Maumont et d'abbé de Magnac, Magnac et Maumont devaient conserver d'eux quelques traces. C'est de ce côté qu'il fallait diriger nos recherches.

À dix kilomètres d'Angoulême, sur le bord de la Touvre, s'élève le château de Maumont dans la paroisse de Magnac. C'est un logis construit au XVIIè siècle et qui n'a rien de remarquable. Maumont a de magnifiques papeteries, et ne sait pas même qu'il eut jadis des seigneurs. Là virent le jour deux frères de notre personnage. De lui, rien.

Des dictionnaires et des biographies disent que Pierre-Louis est né dans la paroisse de Nanteuil en Périgord. Mais il y a Nanteuil au canton de Thiviers, et Nanteuil, canton de Verteilhac (17).

À force de frapper à toutes les portes, on finit par arriver à un Vivier, jadis du Périgord, aujourd'hui de la Charente, jadis du diocèse de Périgueux, aujourd'hui d'Angoulême, cause d'erreurs nombreuses et de contre-marches inutiles. Ce Vivier est situé près de La Valette, aux confins des deux départements de la Charente et de la Dordogne.

Je me souviens du jour où je visitai ces lieux. C'était en automne. Octobre est chez nous plus beau, plus doux, plus calme que mai ; transition entre la chaleur qui s'affaiblit et le froid qui croît, heure intermédiaire entre l'hiver qui s'avance à grands pas et l'été qui a peine à s'en aller. Le soleil était splendide, mais l'air, limpide cependant et pur, semblait encore comme voilé par un reste du brouillard du matin. Il flottait dans la vallée, circulait sur les collines, dont il éclairait pleinement les sommets. Jeu d'ombres et de lumière à ravir un artiste ! La vue s'étendait au loin, au midi vers les campagnes du Périgord, bois, prés, marécages, au nord vers les coteaux de l'Angoumois, champs et vignobles. Sur cette limite indécise des deux provinces, on sent d'une part les fraîches senteurs des grands bois, de l'autre les acres parfums de la cuve qui fermente. Et déjà la vendange se foulait. Scène rustique. Celui dont nous cherchions les traces en avait été le spectateur. Lui aussi avait pu voir ces travaux dont il nous plaisait de contempler en ce moment les phases diverses. Çà et là des groupes de deux or trois personnes cueillaient le raisin. On les voyait alternativement se courber un peu, puis se relever. Le panier était plein ; on passait à un autre cep.

Pas de chants. Le paysan là n'est pas expansif. Ce calme dans le mouvement était curieux à observer. Comme l'homme et la nature s'harmonisaient bien ensemble ! Dans ce paysage frais, reposé, l'être humain se remue, mais sans secousse. Il semble avoir peur de troubler la paix de ces lieux. Il y a de la vie, juste ce qu'il en faut pour les animer. Paisible et souriante campagne, Ruysdael (18) aurait eu du bonheur à la fixer sur une toile immortelle ! Tout est à souhait. De-ci de-là, des feuillages, des bois et des pampres de vigne se tissent autour des bourgs et des villages ; une église les domine de sa flèche aiguë ou de son modeste campanile. C'est là ce qui distingue hameaux et communes. On les compte de l'œil ; combien y en a-t-il en vue ? Ronzenac, Edon, Gardes, Blanzaguet ; plus loin, avec un peu de bonne volonté, l'élégante flèche de Charmant et les tours du magnifique château des Galard de Béarn à La Rochebeaucour. Le plateau de Villebois-La Valette est un des points les plus élevés de la Charente. L'antique demeure des Villebois, bâtie au XIe siècle, a disparu d'abord sous les restaurations du duc d'Epernon, puis sous les reconstructions du maréchal de Navailles en 1671. Ce qui reste encore des bâtiments, où logent des religieuses de l'Ordre de Sainte-Anne de la Providence pour l'instruction des jeunes filles, atteste l'importance de l'ancien castel.

Au pied de la colline, comme sortant du fond de la vallée, le clocher de Saint-Cybard-le-Peyrat, pauvre bourg abandonné. Autrefois prieuré conventuel de l'Ordre de Saint Benoît, ce n'est plus même une succursale. Le Peyrat était un des seize archiprêtrés du Périgord. On n'y a pas même laissé un chef-lieu de commune. Regardons-le cependant avec respect. C'est là que fut baptisé Pierre-Louis de La Rochefoucauld, le 13 octobre 1744. Tout a changé dans l'église et autour de l'église. Qu'importe ? les souvenirs sont vivants. Le nouveau-né a reçu l'eau sur ces fonts ; il s'est agenouillé sur cette dalle. Et tout près, sur la gauche, dominant un paisible ruisseau ombragé d'aulnes se dresse, une habitation, château dans le langage du pays, belle maison de plaisance en face du manoir féodal des Villebois, des d'Epernon et des Navailles.

Inclinons-nous. C'est là qu'il naquit le 12 octobre. Les bâtiments n'ont point perdu leur aspect. Un large portail s'ouvre sur une grande cour. À la pierre qui ferme le cintre se lit cette date, 1668.

Le blason qui y avait été gravé, a été brisé, effacé, comme si les souvenirs se détruisaient par un coup de marteau. Au fond se déploie le vaste corps de logis. Aux ailes, les servitudes, demeure agreste où les maîtres de céans coudaient leurs serviteurs ou leurs métayers. Voici le jardin qui court le long du ruisseau. Ces longues allées de charmilles vieilles, touffues, chenues, l'ont vu jouer et courir enfant. Il s'est baigné dans ces eaux ; il s'est reposé sous ces arbres ; sa mère l'a bercé sous ce toit. Quelles scènes touchantes et douces rappellent ces divers endroits ! Se croirait-on à quelques années seulement des grandeurs périlleuses de l'épiscopat ? L'idylle est voisine de la tragédie ; et le tranquille château du Vivier, du couvent des Carmes.

Si les choses se rappellent encore et nous rappellent Mgr de La Rochefoucauld, il faut avouer que les hommes l'ignorent complètement. Son nom est presque totalement inconnu, là, dans ces lieux pleins du souvenir de sa famille, entre ces murs qui ont vu grandir son enfance. La propriété a changé de maître. L'orage aussi a passé ce modeste coin de terre, nivelant les tombes, emportant les berceaux, effaçant les noms. Trouverons-nous ce que nous venions chercher de si loin ?

Un masureau qui servait de salle d'archives à la mairie de Blanzaguet contient un tas de papiers amoncelés de tout âge et de toute provenance. C'est dans ce fouillis indescriptible que gisent les anciens registres paroissiaux de Saint-Cybard-le-Peyrat. Et parmi ces feuillets épars, sur une pauvre page détachée, isolée, on lit non sans quelque émotion ces simples lignes :

«Le treiziesme du mois d'octobre de l'an mil sept cent quarante-quatre, a été baptisé par moy soussigné un enfant de messire Jean de Larochefoucault, chevalier, seigneur de Momont, Manzac, Barros, Le Vivier et autres places, chevalier des ordres militaires de Notre-Dame du Mont-Carmel et St-Lazare de Jérusalem, et de dame Marguerite des Esco, mariés, demeurant en leur château du Vivié, paroisse de St-Cibard d'Eyrat, icelui né le jour d'hier, auquel avons donné le nom Pierre-Louis. A été parrein Pierre Galet ; marraine Marguerite Bernier, domestiques du sieur et dame de Momont. Le tout en présence de Pierre Saben et François Dussidant, vignerons de Saint-Cibard, qui n'ont sceu signer, ni le parrein et marraine, de ce interpellés.  GENESTE, curé de St-Cibard.»

Le futur évêque, on le remarquera, eut pour parrain et marraine, deux domestiques. C'était une habitude dans les grandes familles ; on donnait souvent pour pères spirituels aux enfants, des gens de peu, artisans ou laboureurs, le plus ordinairement les serviteurs du château, ces vieux serviteurs d'ancienne souche dont la race a complètement disparu. Ils tenaient sur les fonts l'enfant de celui qu'ils avaient nourri et élevé, respectés comme un aïeul, aimés comme un ami indulgent. Cet usage touchant créait ainsi des liens pour l'avenir et il apprenait au fils du très haut et très puissant seigneur qu'il devait beaucoup à son valet ou à sa porchère. Ici la coïncidence était particulièrement heureuse.

C'est donc le 12 octobre qu'est né Pierre-Louis, et non le 13, comme l'indiquent toutes les biographies, comme le porte même l'inscription des Carmes. De plus cette pièce établit nettement sa filiation, le nom de son père, celui de sa mère, et par suite sa situation. C'est une réponse anticipée, mais victorieuse aux fables dont on a voulu environner le berceau de nos deux évêques.

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[Notes de bas de page.]

1.  Un de ses descendants, Aimeri IIe du nom, seigneur de La Rochefoucauld, fils de Guy VI, eut, au milieu du XIIIè siècle, de Daufine de La Tour, fille de Bernard, seigneur de La Tour d'Auvergne, un deuxième fils,

Geoffroy de La Rochefoucauld, seigneur de Verteuil, dont l'arrière-petit-fils,

Guy, seigneur de Verteuil et de Barbezieux, eut, vers 1406, de sa deuxième femme, Marie d'Usaiges, dame de Nouans et de Courpoutrain au Maine, un second fils, Guillaume de La Rochefoucauld.

Ce Guillaume de La Rochefoucauld, seigneur de Nouans du chef de sa mère, eut, par sa femme Marguerite de Torsay, La Bergerie et Le Parc d'Archiac en Saintonge.

Son quatrième fils, Guillaume, qui vivait en 1510, a fait la branche des seigneurs de Bayers et de La Bergerie.

2.  Moissens de Pons d'Albert, Lettre à Mgr Léon de Beaumont, évêque de Saintes (Paris, 9 mai 1713) : «Le grand-père de Mme la comtesse de Culan, dame de Champfleury, avait épousé en Ies noces une fille de Bremont de la maison d'Ars, d'où était venu son père et un autre frère nommé Lagny-Fonthyères qui est mort sans enfants, avec une sœur qui s'était mariée avec Palet de Curzay, dont il y eu des enfans. En secondes noces, ce seigneur de Champfleury épousa La Rochefoucauld la Borgnesse, de la branche de Loumée. Il en est venu un garçon qui se nommait M. du Fresne, qui, je crois, n'a point eu de garçons. Les sœurs ne se sont point mariées, qui peuvent bien être mortes. Mais prenez bien garde de confondre avec les Gombault de Champfleury, un certain Gombault, abbé de Villars, curé d'Angeac-Champagne en Angoumois, qui n'en était point, en en portrait encore moins les armes, quoy qu'il fust gentil homme. Ils se sont fort alliez avec ces Ryoux, originaires de la terre de Pons.»

3.  Marie-Eléonore Chesnel, fille d'une Polignac, arrière-petite-fille de Jean Chesnel et de Marie de Vivonne, fille d'Artus, seigneur de Pisany, et de Catherine de Bremond d'Ars-Balanzac, et sœur du célèbre marquis de Pisany.

4.  Pour la généalogie complète nous renvoyons aux ouvrages spéciaux : Père Anselme de Sainte-Marie, Histoire de la maison royale de France et des grands officiers de la Couronne... (Paris, Compagnie des libraires, 1726-1733 ; tome IV, p. 418) ; Jean-Baptiste Courcelles, Histoire généalogie et héraldique des pairs de France... (Paris, Plassan, 1822-1833; tome VIII) ; François-Alexandre Aubert de La Chesnaye-Desbois et Jacques Badier, Dictionnaire de la noblesse... (Paris, Schlesinger, 1863-1876 ; tome XII) ; etc.

5.  François Vigier de La Pile, dans l'Histoire de l'Angoumois (Paris, Michon, 1846), écrit Birotteau de Marillac, et sur les actes de l'état civil on trouve encore Virollot, Viraullot. Ils eurent entre autres enfants: Jean-François, né le 21 juillet 1733, tenu sur les fonts de la paroisse Saint-André d'Angoulême, le 7 mai 1735, par messire Jean de La Rochefoucauld, chevalier, seigneur de Maumont et de Magnac, et par dame Marie de Fornel, veuve de messire Jean-François de Virolleau, seigneur de Marillac ; Jean, né à Angoulême le 4 juillet 1735, baptisé le 7 en l'église Saint-André, tenu sur les fonts par Jean Ravard, chevalier, seigneur de Saint-Amand, et demoiselle Marie de Virolleau, sa tante.

6.  Jean Thomas, né à Jarnac, avocat renommé, fut conseiller de l'hôtel de ville d'Angoulême depuis 1618 jusque et au delà de 1631. Son fils, Paul Thomas, écuyer, seigneur des Maisonnettes, né à Angoulême, fut maire et capitaine de la ville en 1632 et 1633, échevin et conseiller du roi au présidial. Dès sa jeunesse il cultivait les vers latins ; déjà en 1610, Paul Thomas avait imprimé son volume intitulé : Defensio Engolismensium contra calumnias Meinardi (Bordeaux, Millanges). Il fait paraître Rupellaidossive de rebus gestis Ludovici XIII (Paris, Morel, 1630), un poème en six chants. «Il y décrit, dit Vergier de La Pile, le siège de La Rochelle sous Louis XIII et ses exploits. Il y a beaucoup de fictions et de belles saillies ; les vers sont bons.» Et Balzac, qui s'y connaissait, vante son souffle élevé, son inspiration poétique. Il écrit dans Epistolæ selectæ (1650 ; p.335) : «Quanti oris et quanti spiritus poeta sit Paulus ille Thomas civis meus, non est cur pluribus exemplis apud te probare debeam. Ipse legendo periculum facies, parcamque labori non necessario, uno hoc contentus loco eximii operis, ubi, de expeditione Rhetensi agens, tres illos celebrat....»

Un de ses oncles, Paul comme lui, publiait en même temps un poème en cinq chants sur Paris, Lutetiados libri V (Angoulême, Rezé, 1640). Mais il n'eut pas la réputation de son neveu. Paul Thomas, connu sous le nom de Girac, fit, en 1650, courir, manuscrite, une dissertation latine où il critiquait les lettres de Voiture. En 1633, pendant sa mairie, Paul Thomas imprima ses traductions en vers latins de Job, du Cantique des cantiques et des Lamentations de Jérémie dans Pauli Thomas sacra poemata (Angoulême, Rezé, 1633) ; le frontispice montre les armes de la ville et celles des Thomas : D'or à un cœur de gueules surmonté d'une étoile d'azur, avec la devise : SIC ITVR AD ASTRA. Il mourut en 1663.

7.  Le 14 juin 1790, François-Louis Thomas de Bardines, seigneur de Neuillac en Angoumois, fils de Louis et de Marie-Françoise Préveraud, épousa Marie-Claire-Mélanie de Manes, fille de François et de Marie-Claire de Bremond, qui mourut à Saintes le 22 juin 1849. — C'est sans doute le père, Louis de Bardines, qui publiait fréquemment des vers dans le Journal de Saintonge et d'Angoumois de 1786 à 1790 ; voir notamment, le 7 août 1788, conseils à ma fille, et le 30 novembre, une acrostiche sur Josias de Bremond.

Voir dans la Revue de Saintonge (VIII, 326), un amusant article de M. le baron de La Morinerie sur Delaistre, maître de danse, chanté par Pils et qui libellait ainsi un reçu pour ses élèves les jeunes Thomas de Bardines : «Jej ReConnu avoier resus de Monsieur debardienne pour tout Conte a Retée jusqua sejour La somme de 175 livres pour Le Cartier de Lapansions de messieur de bardimne cher janfant (ses senfants) et de plus 18 liv. a Conte pour les fourniturre tans pour Le maître que pour Les joutre chojees dons Les Cartier de La pansions sera et chus Le premier janvier 1785. Asaintes se 23 9bre 1784.  DELAITRE».

8.  Le 9 mars 1742, meurt au Vivier, âgé de 76 ans, et est enterré le 10 au Peyrat «messire Gabriel des Escaud, muni de tous les sacrements.» GILBERT, curé de La Valette. JOURDAIN, prieur curé de Blanzaguet. GENESTE, prieur de Saint-Cibard.» Le 21, morte au Vivier, est enterrée le 22 au Peyrat, Charlotte de La Place, âgée de 75 ans. Les deux époux se suivirent de près dans la tombe.

La famille des Escaud était noble et portait d'azur à trois chevrons d'argent accompagnés de trois étoiles de même. Au XVIè siècle, les des Escaud étaient zélés Protestants. On trouve leur nom au bas de l'acte par lequel les réformés de l'Angoumois et de la partie du Périgord, assemblés le 15 août 1593, à La Rochebeaucourt, envoyaient des commissaires au roi Henri IV (régné de 1589 à 1610), après son abjuration, pour lui présenter les requêtes et les remontrances du parti. Ce sont avec Jean et René de Galard de Béarn, Louis des Escaud, écuyer, seigneur du Vivier, François des Escaud, écuyer, seigneur de Puyrigaud et Jean des Escaud.

9.  Un Pierre de La Place fut maire d'Angoulême en 1506, et échevin en 1507 jusqu'en 1539. Il était fils de Pierre de La Place et de Liette de Cumont, dame de Saint-Méard et de Salbœuf, paroisse de Cumont en Périgord. Il eut de Marguerite Pastoureau, dame de Javerihac, Élie de La Place, seigneur de Torsac, échevin en 1558 et maire en 1561, qui accueillit Calvin à Angoulême, et Pierre de La Place, seigneur de Javerihac, grand jurisconsulte, savant philosophe, président à la cour des aides à Paris, et qui périt assassiné à la Saint-Barthélemy, en 1572. Les La Place portent d'argent à trois glands de sinople, 2 et 1 ; alias d'azur à trois glands d'or feuillés et tigés de même.

10. Marie-Hélène était fille d'Aignan de Fougeu, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, capitaine de milice à Saint-Domingue, et sœur de Marie-Rose de Fougeu, veuve d'Hubert de Conflans, qu'elle avait épousé en 1750, vice-amiral et maréchal de France en 1758, gouverneur et vice-roi de Saint-Domingue. De ce mariage vint Marie-Joséphine-Félicité de La Rochefoucauld-Bayers, mariée, par contrat signé du roi et de la famille royale, le 26 avril 1785, à Charles-François-Gabriel, comte de Gand, né le 27 décembre 1752, comte du Saint-Empire, grand d'Espagne de première classe, gentilhomme de M. le comte d'Artois, colonel du régiment de Champagne. Elle vivait encore sous la Restauration (1815) ; elle était le dernier représentant de la branche de l'évêque de Saintes.

11. Registre de Saint-Cybard du Peyrat : «Le 19 mars 1768, après les fiançailles et une publication de ban de mariage entre messire Antoine de Corlieu, écuyer, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, ancien capitaine d'infanterie, sans avoir descouvert aucun empeschement civil ny canonique, et les dites parties ayant obtenu de monseigneur l'évesque de Périgueux la dispense pour le temps prohibé et pour les deux derniers bans, et s'étant disposés à leur futur mariage par réception des sacrements ordinaires, je leur ay impartis la bénédiction nuptiale selon la forme prescrite par nostre mère sainte église, en présence de messire Louis-Gabriel Andras du Mesnil, de messire Jean de Juglar, de messire Joseph de Corlieu, sieur de Labaudie, et de messire Jacques de Corlieu, sieur du Luc, qui ont signé avec moy. LATREILHE, prieur curé de Saint-Cybard. ANTOINE DE CORLIEU. C. H. DE LA ROCHEFOUCAULD. I. DE LA ROCHEFOUCAULD. MARIE DE PINDRAY DE CORLEIU. ROSE DE GALLARD. MADELEINE FRADIN DE CLAIX. PASQUET. DU TILLET. DUREPAYRE. MARIE JUGLART. MARIE NORMAND DE GARAT. MARIE-GABRIELLE LOCA ANDRAS DU MESNIL. FRANÇOIS JUGLART JOSSHES DE CORLIEU. JACQUES DE CORLIEU. FRANÇOIS DE CORLIEU DE LOCHES. JOSEPH DE CORLIEU. PIERRE DE CORLIEU DE LOCHE. LOUIS-GABRIEL ANDRAS DU MESNIL DU CHILLIAU.»

12. Pour la généalogie des Corlieu, voir Nicolas Viton de Saint-Allais, Nobiliaire universel de France... (Paris, Bachelin-Deflorenne, 1873 ; tome II).

Les Corlieu d'Angoumois, maintenus dans leur noblesse en 1598 par Marsillac et Benoît, commissaires départis, descendaient, dit-on, d'un Thomas de Corlieu, originaire de l'évêché d'York en Angleterre, qui passa en France l'an 1417 et épousa Renote, héritière de la maison du Fresne en Anjou. De cette union naquit Jean, père de François, lieutenant général de la justice en Angoumois, qui épousa (1490) Marguerite Loubate, dont vinrent Jean, Robert et François. Jean, avocat au présidial d'Angoulême, eut : 1°, François de Corlieu, écuyer, conseiller du roi en la sénéchaussée d'Angoumois (1544), procureur du roi, conseiller de la maison de ville (1558-1574), «homme fort curieux et amateur d'antiquité», auteur d'une histoire de la ville d'Angoulême (1576), qui mourut sans enfants en 1576 ; 2°, Jeanne, femme de Pierre du Part, sieur de La Foucardie ; 3°, Françoise, épouse (1560) de Martial de La Charlonye, sieur de Nouère, avocat au présidial. La seconde branche a pour auteur Robert, fils de François et Marguerite Loubate ; il épousa Marie Pascaud, dont est issu Cybard, marié (1576) à Delphine Gentils de Bardines, qui eut François, sieur de Chantoiseau, dont le fils, Charles, fut père de Joseph-François, sieur de Labaudie, époux (1710) de Marie Sauvo, fille de Jean, sieur du Bousquet, conseiller au présidial d'Angoulême.

De cette union cinq enfants : 1°, Jean-Joseph de Corlieu, chevalier, seigneur de La Croix, époux de Marie-Suzanne de Pindray, puis en 1744 de Louise Babinet, de laquelle sont issus sept enfants tous morts sans postérité, sauf Pierre-Guillaume, garde du corps, époux de Louise Cadot, mort à Poitiers en 1834, dont entre six enfants : Yves-Marie-Hippolyte, mort le 21 novembre 1860 à Provins, époux de Zoé d'Aunay, et Charles-François ; 2°, Antoine, sans enfants d'Hippolyte de La Rochefoucauld ; 3°, Anne ; 4°, Pierre, morts sans enfants ; 5°, Jacques, né le 11 avril 1716, qui eut de Marie de Pindray, deux garçons et trois filles. L'aîné, Joseph, épousa Jeanne de Salignac de Fénelon, dont l'une des six filles, Louise-Françoise de Corlieu de Labaudie, fut mariée à son cousin issu de germain, Charles-François de Corlieu.

La descendance masculine n'existe plus que dans les petits-enfants d'Yves-Hippolyte : Charles de Corlieu, à Saint-Ciers du Taillon, qui a six enfants ; Gustave, 5 enfants ; Henri, 3 enfants ; Pierre, Berthe et Marie.

13. «Aujourd'hui, le 8 août 1730, les cérémonies du baptême ont été différées à messire de La Rochefoucauld, né le 8 du présent mois et an que dessus, ayant desja receu l'eau dans le château.  ARDOUIN.»

«Aujourd'hui, le 22 août 1730, j'ay, curé soussigné, administré les cérémonies du baptême, qui avait été différé, par un ordre de Mgr d'Angoulême dattée du 12 du présent mois, à messire Annet-François de La Rochefoucauld, fils naturel et légitime de messire Jean de La Rochefoucauld, chevallier, seigneur de Momon, Magnat, Barreau et autres lieux, et de dame Marie-Marguerite Desescaut ; et a été parrain messire François-Gabriel des Escaud, chevalier, seigneur de Cursac, Chaumon, du Vivier et chevalier de l'ordre de Saint-Louis, et marraine dame Marie-Anne Jensain, dame de Torsac.»¹

[¹ Soit «Aujourd'hui, le 22 août 1730, j'ai, curé soussigné, administré les cérémonies du baptême, qui avait été différé, par un ordre de Mgr d'Angoulême daté du 12 du présent mois, à messire Annet-François de La Rochefoucauld, fils naturel et légitime de messire Jean de La Rochefoucauld, chevalier, seigneur de Maumont, Magnac, Barros et autres lieux, et de dame Marie-Marguerite des Escaud ; et a été parrain messire François-Gabriel des Escaud, chevalier, seigneur de Cursac, Chaumont, du Vivier et chevalier de l'ordre de Saint-Louis, et marraine dame Marie-Anne Jensain, dame de Torsac.»]

14. «Aujourd'hui, le 8 janvier 1734, les cérémonies du baptême ont été suppléées à messire Alexandre-François de La Rochefoucauld, fils naturel et légitime de messire Jean de La Rochefoucauld, chevallier, seigneur de Mosmont, Magnac, Baraud et autres lieux, et de dame Marie-Marguerite des Escaud, ses père et mère ; et a été parrain messire Alexandre de Gallard de Béard, comte de Brassac et de La Rochebeaucourt, et marraine dame Jeanne-Françoise Meurin, dame du Vivier ; le tout en présence des tesmoings qui ont signé....»¹

[¹ Soit «Aujourd'hui, le 8 janvier 1734, les cérémonies du baptême ont été suppléées à messire Alexandre-François de La Rochefoucauld, fils naturel et légitime de messire Jean de La Rochefoucauld, chevalier, seigneur de Maumont, Magnac, Barros et autres lieux, et de dame Marie-Marguerite des Escaud, ses père et mère ; et a été parrain messire Alexandre de Galard de Béarn, comte de Brassac et de La Rochebeaucourt, et marraine dame Jeanne-Françoise Meurin, dame du Vivier ; le tout en présence des témoins qui ont signé. ...»]

15. C'est à peu près tout ce que savent les auteurs chargés de nous instruire et de nous fournir des détails. Voici ce qu'on lit par exemple dans A.-V. Arnault, A. Jay, E. Jouy et J. Norvins, Biographie nouvelle des contemporains (Paris, Librairie historique, 1820-1825) plus rapprochée des deux évêques :

«François-Joseph de La Rochefoucauld-Bayers naquit en 1735, devint évêque de Beauvais et pair de France en 1772. Député aux États généraux en 1789 par le Clergé du bailliage de Clermont en Beauvoisis, il fut un des membres les plus opposés aux changements politiques qui signalèrent bientôt l'assemblée constituante. Arrêté en 1792 par suite de ses opinions contre-révolutionnaires, ce prélat fut enfermé aux Carmes, et au mois de septembre une des victimes du massacre des prisons.»

«Pierre-Louis de La Rochefoucauld-Bayers naquit en 1744 et fut nommé agent général du clergé en 1775. Évêque de Saintes en 1782, il fut nommé député aux États généraux en 1789 et signa les protestations du 1er et du 12 septembre contre les décrets de l'assemblée constituante. Ce prélat, qui avait échappé à la proscription, fut victime de son dévouement fraternel. Informé de la détention de son frère, il se constitua lui-même prisonnier afin de pouvoir le soulager, et périt avec lui.»

Tout cela est encore plus explicite que l'article par Louis-Marie de Richemond et Henri Feuilleret dans la Biographie de la Charente-Inférieure (Niort, Clouzot, 1877), qui sur onze lignes en emploie cinq à dire que «les branches de Marsillac, de Roucy, de Roye, de Montguyon, de Montandre et de Barbezieux de la maison de La Rochefoucauld embrassèrent la réforme, et y demeurèrent fidèles après la révocation de l'édit de Nantes¹.» [¹ L'Édit de Nantes, rendu par Henri IV le 13 avril 1598, conféra un statut légal à l'Eglise protestante en France : sa révocation, le 18 octobre 1685, est considérée comme la plus grave erreur de jugement de Louis XIV.]

16. Le vieux château de Bayers qui domine la Charente, à quelque distance de Verteuil, fut un fief patronymique d'une branche de la famille, comme nous l'avons vu. Mais les La Rochefoucauld-Maumont, issus des Bayers, n'avaient plus cette terre depuis longtemps. Ce n'est qu'en 1749, par l'extinction masculine de la branche de Bayers, que les Maumont firent revivre ce titre. Voilà pourquoi nous trouvons un La Rochefoucauld-Maumont, maréchal de camp, qualifié légitimement de marquis de Bayers, et son frère puîné, lieutenant de vaisseau, appelé comte de Bayers. Ils étaient alors les aînés des deux branches subsistant en une seule, celle des Maumont-Bayers.

17. François Marvaud, Géograhie physique, politique, historique, archéologique, agricole, commerciale et industrielle du département de la Charente,... (Angoulême, Girard, 1850 ; p. 59), prétend que Nanteuil est «dans la commune d'Edon.» Son portrait dans la collection des députés aux États généraux, porte ces mots : «Né au Vivier, diocèse de Périgueux, le 13 octobre 1744.» Cette indication devait être véritable et le millésime authentique. Mais les Vivier sont aussi et plus nombreux que les Nanteuil. Il y a Le Vivier en la commune de Neuvic, chef-lieu de canton de l'arrondissement de Ribérac ; il y a Le Vivier, en la paroisse de Beauronne, à 22 kilomètres de Neuvic ; il y a Le Vivier près du Bugue, petite ville à 28 kilomètres de Sarlat, et sans doute d'autres encore. Que de recherches et de tâtonnements !

18. [Note de l'éditeur.  Le peintre hollandais Salomon van Ruysdael (c. 1600-1670) eut un penchant pour la peinture de paysages.]


Deux photographies du château de La Rochefoucauld par
Gaspard-Félix Tournachon, dit Nadar (1820-1910).

Photographie du château de La Rochefoucauld (façade nord) - libre de droit ?   Photographie du château de La Rochefoucauld (deux tours jumelles) - libre de droit ?



«Deux victimes des Septembriseurs» :
Table des Chapitres ; Lexique ; Chapitre 2

[Dr R. Peters : rpeters@wissensdrang.com]